Flânerie parisienne.

 

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Place de la Concorde, se dresse l’Obélisque, monolithe céleste, rayon de soleil figé. Je marche d’un pas tranquille, nonchalant. Le nez au vent, sourire béat.
Jardin des Tuileries avec ses fantômes : Catherine de Médicis, Colbert, Le Nôtre. Puis la grande roue de Paris.
Une rigole d’eau dans le caniveau. Il fait trop beau. Je saute dedans à pieds joints. L’eau fraîche éclabousse le bas de mon pantalon. Qu’importe, il fait beau, j’ai 50 ans.
Quand d’autres froncent les sourcils à l’approche de la cinquantaine, se prennent la tête, se font mousser le neurone, moi je saute dans les flaques d’eau. Je m’assois sur le trottoir des champs Élysée, je tire la langue aux vieilles.

Vitrine du Luxe et du Prestige parisien.
Je croise les jambes, regarde les chiens passer. Pas que les chiens d’ailleurs, les chats, mais ils sont rares eux. Les gens qui aussi.
C’est bête, je n’ai pas de petits bateaux. Non, pas la culotte ! Celui qui flotte, en papier journal et qu’on laisse s’enfuir dans la rigole du caniveau.

Il fait beau, c’est l’été, j’ai 50 ans aujourd’hui !

— Ça ne se fait pas de s’asseoir par terre à votre âge !
C’est une vieille perruche avec des plumes multicolores sur son chapeau, comme chantait Sardou. Ha non, Sardou c’était des cerises. Elle me balance un euro.

— Chouette, je vais m’acheter des carembars !

Elle hausse les épaules et s’éloigne méprisante.
Bah quoi ? Est-ce que j’ai l’air d’une cloche ? J’ai le pantalon et la chemise propre, repassée. Des chaussures italiennes. La même veste que Delon, j’ai même la cravate de chez Disney !
Bon OK, vous me direz que Pluto, avec mon costard, ça cloche. Mais quoi, j’ai tous les droits ! J’ai 50 ans maintenant ! Et si moi j’ai envie de me balader en culotte courte et de sauter dans les flaques d’eau avec une cravate avec Pluto ou Mickey ? Si j’ai envie de m’asseoir par terre les pieds dans le caniveau, si j’ai envie de faire les pieds au mur, de jouer à pisser contre les murs, à faire la fontaine ? Ça dérange qui ? Si moi j’aime ça !

Le terme « CHAMPS-ÉLYSÉES » vient du mot grec Elusia. Qui a ensuite donné en latin Elysium. Ce terme qui signifie « îles bienheureuses » où les héros et les âmes vertueuses venaient se reposer. Ça tombe bien, c’est ce que je fais, je me repose, même si je ne suis que le héros de ma propre vie.
Je fais un grand sourire à une gamine de 45 balais avec des couettes et qui passe devant moi. Une Américaine certainement, l’ambassade n’est pas loin. Bon, ça doit être la cravate, elle hausse les épaules et accélère-le pas. Encore heureux que je n’aie pas mis mon blouson noir et mes santiags, elle aurait crié au viol !

Le ciel est bleu, pas un nuage, ou un petit, pour la toile de fond, genre carte postale. Un chien s’arrête, un caniche noir, se gratte l’oreille avec la patte arrière. Tourne la tête à droite, à gauche. Pas un collègue pour lui renifler le cul…
C’est vrai que ça ne va pas cette cravate. Ça fait péquenaud. Bon dans le 18e arrondissement, on ne m’aurait même pas remarqué, mais sur les Champs-Élysées où tout est possible, se promener, séjourner, faire son shopping, aller au restaurant ou au spectacle, fréquenter les meilleures discothèques, faire la rencontre de sa vie, un type en costume avec une cravate de Pluto, ça fait tache quand même.

Je me taperai bien une glace italienne, une poire banane, avec du caramel, des noisettes et de la nougatine. Une 3 boules au moins, parce qu’après ça tombe par terre. oui, mais pour ça, faut que je monte jusqu’au Lido. Une bien crémeuse, avec une belle forme en tourniquet.
Le jeu c’est de tenir le plus possible sans rien faire tomber. En fait, il faut rester parallèle à l’axe du cornet. Enfin généralement, à moins de grande chaleur, de distraction, elle n’a pas le temps de fondre. Pas avec moi.

Une vielle japonaise me demande pour me prendre en phot, s’exécute et s’éloigne avec un sourire béat qu’elle adresse aux pigeons, hauts dans le ciel. Comme ça, à Tokyo, ils sauront que les SDF français portent des costumes et des cravates de Walt Disney. Elle a la preuve maintenant !

Pas le choix, je dois me lever et y aller si je veux ma glace.
Le caniche me regarde me lever, hésite, puis prend la direction opposée à la mienne. Je ne dois pas avoir assez de conversation pour lui.
En passant, je croise justement un SDF, un vrai. Je lui refile ma cravate et un billet de 5 euros.
Je crois que le caniche est à lui parce que je vois ce dernier arriver vers une gamelle pleine d’eau qui se trouve aux pieds du SDF.
Je passe devant une vitrine, croisant mon reflet. C’est vrai que ça va mieux sans Pluto. Pour un peu, je ressemblerai à Bernard-Henri Lévy, en blond. Chemise blanche, cheveux mi-longs. Ha si, j’ai la moustache en plus. Bref, passons. Je ne vais pas flatter mon ego pendant une heure. Même si pour 50 ans je ne me trouve pas trop ruiné.
Le glacier italien m’attend à 500 mètres.

Assieds sur un banc, j’observe chaque détail de cette avenue, chaque trace depuis ma première venue. Je ne me souviens ni de l’époque ni de mon âge, comme un villageois ne se rappellerait plus de la première fois où il est passé devant l’église de son village. Oui, c’est vraiment une grande et belle avenue par ses proportions.
Avant il y a une trentaine d’années que c’est en semaine ou le week-end, le soir une foule de personnes se promenaient, admiraient les boutiques, on s’attablait pour prendre un verre sur une terrasse.
Des noms, comme une chanson danse devant moi, comme un refrain connu. Vuiton, Guerlain, une des seules vitrines qui n’a pas eu son relookage moderne, Ladurée, Planet Hollywood, le Lido ou le Fouquet’s. Les cinémas n’ont pas changé. Les enseignes célèbres des marchands de voitures elles aussi ont pris un sérieux coup modernisme.

Il y a très longtemps, j’aimais me promener sur les Champs et aller dîner au Fouquet « s. Le Fouquet « s, ancien estaminet de cochers situé à l’angle de l’avenue Georges V.Point de ralliement de tous les héros qui ont fait la gloire des ailes françaises pendant la guerre.
Le Fouquet « s, c’est Raimu, Marlène Dietrich, Fernandel, Gabin, Carné, Clouzot, Guitry qui venaient y signer leurs contrats. Puis Truffaut, Godard, Chabrol.
Enfin, en 1976, Maurice Casanova qui souhaitait en faire le haut lieu du Tout-Paris avec son ami, Georges Cravenne. Ils seront à l’origine des soirées des Molières, des Césars ainsi que de nombreux prix littéraires et culinaires.
Puis Lucien Barrière le rénovera pendant l’été 1999 avec le décorateur J.Garcia. Pas José non, l’autre. Le Fouquet « s célébrant officiellement sa réouverture et son centenaire les 8 et 9 novembre 1999.
Aujourd’hui, cet établissement de très grand luxe est à la mesure des attentes d’une clientèle internationale habituée au meilleur et toujours en quête d’étonnement. Désormais, la tradition s’unit avec la modernité et le Fouquet « s prend place au cœur de ce nouveau palace parisien. Il faut reconnaître avec respect, le sens créatif de l’architecte Édouard François à travers le jardin intérieur qui fait sa fierté ! Et la beauté de la terrasse panoramique.
Néanmoins, je reste nostalgique, Paris c’est mon endroit, c’est chez moi. Je sais sa beauté sous toutes ses formes, il faut simplement savoir regarder et se souvenir.
Il est à nouveau bien agréable de se promener sur les champs Élysée, grâce à la suppression des contre-allées de voitures, à la plantation d’une deuxième rangée de platanes et à la relative homogénéité du mobilier urbain.

Bon, ma glace est finie et j’ai des Fourmis dans les jambes. Mon regard quitte le Fouquet « s et se dirige vers l’Arc de Triomphe où tant de présidents se sont succédé. Énorme rond-point de douze avenues percées par le baron Haussmann, alors préfet du département de la Seine. Le Soldat inconnu de la Première Guerre mondiale dont on a tant cherché à savoir qui il était. Même pas certain qu’il était français.

Envies de redescendre vers la Seine, donc je prends l’avenue Hoche, car j’ai l’intention de passer par l’avenue Bertie Albrecht. Hommage modeste pour ce nom évocateur, pour moi. Cette avenue n’est ni large, ni grande, ni bordée d’arbres, mais cette appellation honore Bertie Albrecht et j’ai le plus grand respect pour cette grande résistante française. L’avenue comporte surtout des immeubles datant des années 1900, construits sur l’emplacement d’un couvent d’augustines qui s’appelait alors avenue du Parc Monceau. Elle a fut rebaptisée en 1944, un an après la mort de Bertie Albrecht.
Les rues portant des noms féminins sont assez rares dans Paris. Assez pour que je me remémore qui est cette femme. Je me souviens avoir beaucoup lu sur elle.

Moins de monde ici, je rejoins l’avenue de Friedland. Retraverse l’avenue des champs Élysée pour prendre l’avenue Georges V, qui me conduira au pont de l’Alma. Je passe devant le fameux Crazy Horse. Souvenir d’un passage comme serveur au bar, du temps d’Alain Bernardin. Alain, le patron et créateur du fameux cabaret où le nu est un art véritable. Même si Alain Bernardin décède en 1994 et ne fut jamais vraiment remplacé dans la sublimation culturelle de la femme, sinon par ses trois enfants qui reprirent la direction de ce magnifique endroit. Mais le Crazy Horse n’est plus tout à fait le même sans monsieur Bernardin. 6 mois comme serveur, l’occasion de faire connaissance des danseuses, Kiki Zanzibar, Vanilla Banana, Sunny Paradis, Loida Calumet, Carla Nostalgia, j’en ai oublié certainement.
Je passe ensuite devant le palace Georges V. Souvenir de plusieurs séjours. L’un des plus prestigieux hôtels de Paris et même comme l’un des plus luxueux du monde.
Piscine couverte, hydrothérapie, massages, hammam, jacuzzi, institut de beauté, salon de coiffure. Boutiques, service de blanchisserie, voiturier. Tour y est. Normale, la nuit avoisinant les 1000 euros la chambre.

C’est sans regret que je quitte l’hôtel, juste un regard en arrière, pour rejoindre la Seine en passant par le palais de Chaillot.Pas de trace de la folle !
Le musée de l’homme, de la marine sont bien là eux. Celui du cinéma aussi. Souvenirs de visites avec différentes écoles. Par la suite, visite personnelle dont je ne me lasse pas. Il faudra que je programme de nouvelles visites pour ces musées. Il y a si longtemps. Tiens, ne pas oublier le palais de la découverte, où j’ai passé tant d’heures dans les différentes galeries.
En face du palais de la folle, de l’autre côté de la Seine, la tour Eiffel bien sûr. Symbole de Paris, de la France.

Mon Paris. J’ai beau l’avoir vu 50 fois. En avoir fait 100 fois le tour. Je ne peux m’empêcher de m’asseoir et de l’admirer. Pas la tour seulement, l’ensemble. Ce parc du champ de Mars.
Je suis chez moi.

 

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